Compte-rendu de courseCourses

ANJOU SWIMRUN 2024

T’AS VOULU VOIR ANGERS ET ON A PARTICIPÉ AU SWIMRUN D’ANGERS

La 5ème édition de l’Anjou Swimrun au Lac de Maine a eu lieu le Samedi 4 Mai 2024 organisée par le SCO ANGERS TRIATHLON qui a repris le flambeau. Deux formats, S (12 km CàP 2 km Nage) et M (22 km CàP 5 km Nage), y sont proposés, uniquement à destination des binômes, pour conserver l’esprit d’origine. Jean-Christophe Fourquez accompagné de sa partenaire Emmanuelle Teahuppo nous raconte sa course haute en couleurs.

Après une bonne prépa encadrée, nous arrivons en pleine forme à une semaine de l’échéance, les données météo sont claires : il pleuvra, l’eau ne sera pas chaude, il fera froid. A bon entendeur…
2 jours avant de partir, on se décide à améliorer l’équipement de base : chaussons néoprène, lycra, cagoule néoprène pour moi, bonnet néoprène et gants pour Emmanuelle. Et puis nous avons reçu nos nouveaux pull-buoys venus directement d’un fabricant suédois.

Le Jour J

Après 2 heures de trajet en voiture, nous découvrons le théâtre de notre terrain de jeu du jour. Il tombe des cordes. Il fait 12 degrés, l’eau à 15 degrés. Nous sommes accueillis dans une base de loisir composée d’un plan d’eau, le lac de Maine et un bâtiment avec une toiture en pyramide. Le speaker crache dans son micro. On est au bon endroit. Nous validons nos inscriptions auprès de bénévoles très souriants.

Notre équipe s’appelle « Les Sensationnels » C’était le nom qu’on s’était donné lors de notre participation au swimrun de l’Ile de Ré en 2022. Nous aurons le numéro 44. Dans la poche qui nous est remise, on trouve 2 chasubles, 2 bonnets rouges, une puce de chronométrage, 2 petits gobelets souples et 2 jolies casquettes de l’évènement. Jolis cadeaux. Allez, plus le moment de reculer, il est temps de se préparer et s’habiller… sous la flotte et dans le froid. On a fait évoluer nos équipements… un peu au dernier moment, sans avoir réellement essayé en situation, mais bon, on fera avec.

On a lu que pour les chaussons néoprène, il faut faire des trous pour que l’eau s’évacue. On le fait au cul de la voiture avant de les enfiler. Ce sera une bonne idée. Impeccable, je n’ai jamais eu froid aux pieds.
Le départ des concurrents de la distance M est donné. Briefing d’avant course pour notre distance S, on nous indique que le parcours a été modifié au dernier moment. Je n’y prête pas vraiment attention sur le moment. Ça nous jouera un tour au cours de l’épreuve…

Le départ

C’est à nous de nous élancer. Nous sommes 65 équipes à franchir l’arche de départ. Le swimrun débute par un premier segment de course à pieds pour 1 480 m. Ça part très vite devant. Nous avions convenu d’une allure raisonnable. Alors, on laisse filer le paquet et on se cale. Un poil trop vite mais on y arrive. Emmanuelle me dit : « Je suis bien ». Bonne nouvelle !

On arrive à la fin de ce premier segment. C’est une traversée du lac qui nous attend pour 450 m. Les concurrents de tête sont déjà sur l’autre rive. Emmanuelle se lance, l’eau est froide, mais c’est supportable, couleur maronnasse. Je la suis, attaché à elle par une longe élastique qui nous relie.

La longe se tend, je me mets en route. C’est pas simple. Je suis engoncé dans mon équipement. J’essaye de faire tourner les bras. Ça part et tout de suite je touche les pieds d’Emmanuelle. Faut que je me décale. J’essaye de nager à sa gauche. On est dans un paquet, y’a du monde partout. Ma cagoule est mal ajustée, je galère à respirer. Ma lunette de gauche n’est pas étanche. Ça promet. Je bois la tasse. La galère commence. Et puis y’a ce gros pull-buoy que j’ai du mal à gérer…

C’est plus possible. Je me débats, c’est la m…

On continue tant bien que mal. Emmanuelle est devant, elle ne lève pas la tête, elle avance. Un gars se rapproche de moi par la gauche. Il me coupe la trajectoire. Il ne nage pas droit. Je le pousse une fois, il revient, puis on s’engueule un bon coup. Il disparaît. J’essaie de me reconcentrer. Aïe l’élastique qui me relie au pull-buoy se détache. Il m’échappe… et la longe se tend. Je me contorsionne et je le rattrape et bim, un grosse tasse de plus. J’essaie de nager comme ça mais ça tient 10 mètres. C’est plus possible. Je me débats, c’est la m… . Je prends le pull-buoy comme planche et je brasse… la honte !! Emmanuelle ne se relâche pas, continue son effort et n’emmène au bout de cette portion de natation.

Enfin on sort de l’eau, on part en course à pieds, se caler à l’allure. 1200 m de course à pieds. Ça passe. On arrive à la plus grosse portion de natation, 780 m. On se met à l’eau, un type nous dit : « vous voyez la grosse bouée blanche en face, c’est là-bas ». Ben oui, ça paraît facile dit comme ça. Il n’en sera rien. Je me lance. Et très vite ça se complique.

L’émotion monte, je me demande vraiment ce que je fous là

Je tape les pieds d’Emmanuelle, je choisis de me décaler, mais ma main se prend sans arrêt dans la longe me bloque le bras droit. Une tasse, deux tasse… vous vous doutez de la suite. C’est plus possible. On s’arrête. Je dis à Emmanuelle de détacher la longe. On repart. On nage côte à côte. Je vois son visage à chaque respiration, puis ses hanches … puis ses jambes, puis ses pieds, puis je la vois s’éloigner sans rien pouvoir faire de plus. Je m’arrête pour rependre mon souffle.

C’est le bazar, je ne parviens pas à poser ma nage, je ne nage pas droit, ça m’agace, je m’énerve et perd patience. J’essaie de continuer, viser un canoë de la sécurité. Je le dépasse. Punaise c’est encore loin… Et le pull-buoy qui se détache encore une fois à 200 m de l’arrivée. J’explose. L’émotion monte, je me demande vraiment ce que je fous là. Et puis Emmanuelle a filé. Bref, je pers mes moyens.

Je m’arrête, je lève la tête, une silhouette à 20 mètres est de dos derrière moi. Elle me semble attendre son partenaire. Je crie le plus fort que je peux : « Chérie, je suis là !! ». Une deuxième fois encore plus fort. La personne ne se retourne pas. C’était pas Emmanuelle…. Bon faut repartir. J’essaie de tenir mon pull-buoy entre les cuisses. C’est la misère.

Un mec a pitié de moi et ramasse la longe qui traîne derrière moi.

J’arrive au rivage, je suis exténué et très en colère. Emmanuelle m’attend gentiment dans l’au. Elle m’aide à sortir, me console et m’encourage mais je ne l’entends pas. Je suis submergé par mes émotions et ce nouveau revers en natation.
Un ravito sur la plage, je suis en vrac, je m’y arrête , chope 2 rondelles de banane, je balance à la cantonade : « je bois pas, j’ai assez bu en nageant ». Quel con !!

Un mec a pitié de moi et ramasse la longe qui traîne derrière moi. Allez, c’est reparti pour la plus grosse portion de course à pieds, ça promet. Je suis à bout. Emmanuelle veut me rassurer et m’encourager. Rien n’y fait. Je tourne en boucle et je râle. Un lacet de chaussure s’est défait dans la bagarre. Obligé de m’arrêter pour le remettre. Emmanuelle file devant, je repars pour la rejoindre. En fait, il y a le deuxième aussi qui est défait, mais merde, pas le temps de le remettre.

On passe le point de contrôle de chrono, proche de la ligne de départ. Le speaker annonce le passage des « Sensationnels » . Je suis en larme. Je dis à Emmanuelle : « On aurait mieux fait de s’appeler les merguez tellement on est nuls ». Je ne supporte pas d’avoir aussi mal nagé… Emmanuelle essaie de me rassurer. Je ne l’écoute que d’une oreille. Sur le côté, un binôme, le père et sa fille de 17-18 ans. Elle grelotte de froid et le père qui lui hurle : « On abandonne, c’est bon comme ça ».

Et moi de dire à Emmanuelle entre deux grommellements : « J’ai jamais dit que je voulais abandonner !! ». Ça se tasse, on court. On rentre dans une partie boisée, faut que je me recentre sur l’allure pour ne pas faire n’importe quoi et mettre dans le rouge ma chérie. Le sentier monte, on passe une bosse. On ralentit. On arrive sur une route. Ça descend. Se laisser aller, ne pas freiner pour ne pas se fatiguer. Emmanuelle gère bien. Et puis une nouvelle bosse. Ça grimpe sévère. Une maison s’appelle « le rocher », c’est dire. Ne pas forcer sur cette côte pour garder assez de force pour descendre parce qu’il y aura forcément une descente.

C’est parti, sans freiner, on retrouve la verdure. On arrive sous un grand pont très haut devant une rivière. Le type dit : « C’est là-bas, en montrant l’autre rive, Attention y’a du courant. Nagez devant les canoës et ne vous approchez pas des piles du pont ». Deux concurrentes devant nous se mettent à l’eau et lâchent un cri : « C’est froid !! ». Moi j’y vais sans me poser de question. J’entends le type dire en parlant de moi : « lui il ne dit rien ». J’ai juste envie de traverser sans trop de difficulté.

On se lance et ça se passe plutôt bien. Je nage à côté d’Emmanuelle, je tiens le rythme, ça va. On sort de l’eau, on passe sous le pont et rebelote, faut retourner de l’autre côté à la nage. 2 sorties. On vise celle de droite mais c’était celle de gauche. On se laisse un peu prendre par le courant. On arrive. Ouf !! Nous repartons en courant sur un chemin le long de la rivière. Des marcheurs sont là. Ils s’arrêtent et s’écartent pour nous laisser passer et nous encouragent.

C’est qu’elle est en canne ma chérie. Elle assure !!

Nous croisons un certain nombre d’autres concurrents. J’en déduis que nous sommes en direction de l’extrémité du parcours et que nous reviendrons par ce chemin. Caler l’allure. Emmanuelle a les jambes lourdes. Le froid, la fatigue ? On ralentit et puis ça va mieux. On relance. Changement de direction : A DROITE TOUTE.

On rentre dans la forêt , un chemin caillouteux escarpé. Ne pas s’affoler. Marcher, marcher, marcher. Garder une allure quand même.
On croise des concurrents qui eux redescendent et nous encouragent. C’est que le montée ne doit pas être si facile. On arrive en haut, il y a un belvédère. On ne voit rien, il pleut… On repart, pas le temps de s’attarder. Ça descend, ça se passe bien. Emmanuelle suit et se débrouille très bien. C’est qu’elle est en canne ma chérie. Elle assure !!

Nous arrivons en bas…déjà ? Et on repart sur ce chemin qui borde la rivière. C’est là qu’on s ‘aperçoit du changement de parcours. Plus rien ne correspond avec les notes. C’est long, c’est très long. Ça n’en finit plus. Ma chérie est dans le dur. On s’arrête. On repart. On marche. On court. On s’arrête. On repart. Enfin on rentre dans une forêt, on quitte le chemin. Un bénévole dit : »Ravito dans 50 mètres et après à l’eau ». On attendait tellement cette dernière portion de nage. La course à pied devenait interminable.

Nous nous mettons à l’eau. C’est froid là. La longe se tend, je me mets en route. Je touche les pieds d’Emmanuelle, je me décale, j’arrive à la hauteur de sa tête. Tenir… Je n’y arrive pas. Je revois ses hanches et je me cale dans ses pieds. On continue. On pense être arrivés à la fin de cette portion, mais c’est plus loin et on continue mais non, c’est plus loin. Emmanuelle finit part haranguer un bénévole dans un canoë qui dit que c’est à 50 mètres… Hum, hum, ça paraît interminable.

L’arrivée

Merci à l’organisation, c’était génial.

Nous sortons de l’eau. Je suis hagard. On court 200 m et voilà la ligne d’arrivée. C’est fini. C’était dur. Nous tombons dans les bras l’un de l’autre. Je suis très ému. Il me faut un peu de temps pour m’en remettre. Nous sommes très fatigués. On fait quelques pas. Deux bénévoles s’approchent pour récupérer les chasubles. A voir notre état, ils nous disent juste : « levez les bras, on s’occupe du reste ».

Un jeune garçon nous passe la médaille de finisher autour du cou. Elle est belle cette médaille et il me semble que nous l’avons bien mérité. Nous finissons en 2h28’57 à la 56ème place, y’a encore du boulot, mais on s’en sort bien pour cette épreuve qui avait plutôt le goût d’une répétition générale de début de saison. On s’y remet, on bosse vraiment la natation en eau libre et on vous tient au courant pour les prochaines épreuves…
L’aventure est au coin de la rue. Merci à l’organisation, c’était génial.

✍️ Jean Christophe Fourquez
📷 Jean Christophe Fourquez / Anjou Swimrun
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