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Interview ÖtillÖ Swimrun World Champions 2021 Oscar Olsson & Adriel Young

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Oscar et Adriel, au fur et à mesure de la saison écoulée, sont montés en puissance. Leurs victoires à Utö, et surtout Göteborg ont sans doute marqué les esprits. À l’annonce du forfait de la team Kraken swimrun, Pontus Lindberg et George Bjälkemo, tenante du titre 2019 (voir leur interview là), beaucoup d’experts ont mis une pièce sur la paire australo-suédoise. Oscar et Adriel ont répondu avec candeur à nos nombreuses questions.

OtillO Swimrun World Championship 2021

Swimrun France: Bonjour Oscar, Adriel. Tout d’abord toutes nos félicitations pour les nouveaux champions du monde de swimrun ! Pouvez vous vous présentez à nos lecteurs ? Comment vous êtes vous connus pour faire ce binôme victorieux ?

Adriel Young: Merci. J’ai eu la chance d’avoir pratiqué un grand nombre de sport lors de mon enfance. Je n’excellais pas particulièrement à un sport, mais j’adorais faire du sport, j’ai tout essayé. Mon implication dans les sports d’endurance a commencé à partir de fin 2012 lorsque j’étais professionnel « lifeguard » (surveillance de plage). Avec quelques copains, nous nous sommes inscrits pour un Ironman qui s’est révélé une superbe expérience. J’ai pratiqué le triathlon jusqu’à la fin 2015. J’ai eu de magnifiques expériences durant ces trois années. En 2016, je me suis inscrit avec Eva Fundin à une World Series ÖtillÖ. Je ne m’y connaissais pas vraiment en swimrun à l’époque, mais nous avions eu un fantastique jour là bas. Professionnellement, j’ai bossé à Bondi Beach, Sydney, Australie, en tant que surveillant de baignade de plage, puis ensuite en Floride avec mon épouse. J’ai par la suite bougé en Suède avec ma femme où j’occupe un job plus classique de bureau. Oscar et moi nous nous sommes connus évidemment grâce au swimrun. Nous fûmes adversaires sur les courses, et c’est cela la magie du swimrun : une grande communauté comme nulle part ailleurs où les personnes sont réellement amicales, vraies. Je sais bien que c’est un « petit » sport, mais j’espère qu’il restera comme cela.

Oscar Olsson: Merci ! J’ai, gamin, débuté le sport par le foot. À partir de là, j’ai essayé de nombreux sports dans ma jeunesse. Le football fut celui prédominant, mais j’ai aussi pratiqué l’athlétisme durant l’adolescence. J’ai plutôt bien performé du 800 au 1500 m, saut en longueur, hauteur et à la perche. Lors de mes 21 ans, j’ai découvert le triathlon, et j’en ai fait pendant dix années (8-10 Ironman à mon actif) ! En 2011, j’ai appris l’existence du Swimrun et en 2013 j’ai participé à ma première course l’Ö-loppet (maintenant ÖTILLÖ Gothenburg). J’ai connu Adriel en 2014, sur un triathlon il me semble..et par la suite sur des courses de swimrun. Il est tellement un très grand athlète, dans et hors compétitions. Par conséquent c’était un plaisir de pouvoir m’associer à lui dès que j’en ai eu l’opportunité. Ce fut en 2018 la première fois que nous courrions ensemble je crois.

SRF: Oscar, avant d’être en équipe avec Adriel, tu as eu plusieurs partenaires les années précédentes. Est ce, d’après toi, la meilleure manière d’améliorer ses compétences relationnelles en swimrun ?

OO: Lorsque l’on parle du Swimrun, et que l’on voit dans la direction dans laquelle le sport évolue, je pense qu’il devient primordial d’essayer de travailler avec le même partenaire dans l’objectif d’aller le plus rapidement possible en course. Ceci dit, on ne peut pas toujours garantir le résultat lorsque l’on court en équipe, car on dépend aussi de l’autre. Dès lors il est aussi très important d’être en capacité de travailler notre relationnel afin de pouvoir être compétitif avec plus qu’un partenaire. J’imagine que l’on peut parfaire cette qualité à l’entrainement et en course avec différents profils de personnes, garder une ouverture d’esprit sur les différences de comportement des uns et des autres. Il faut davantage se concentrer sur les forces de chaque personne et que ses faiblesses.

SRF: Adriel, à l’époque, ton passé de « Aussie » sportif t’a exposé à de nombreux sports. Je suppose que cela t’a donné un pool de compétences assez unique, spécialement dans l’univers aquatique. Quel serait d’après toi, le principal transfert de compétence le plus utile pour le swimrun ?

AY: J’estime que la meilleure aptitude c’est d’être à l’aise dans l’eau. Je trouve que c’est très relaxant d’être dans l’océan, surtout lorsque les conditions y sont âpres. J’ai passé tellement de temps à me jeter à l’eau quand les éléments étaient dangereux que c’en est devenu presque naturel pour moi.

SRF: Avant d’aborder le sujet principal des championnats du monde de Swimrun ÖtillÖ WC 2021, comment s’est déroulée la saison des World Series ÖtillÖ malgré la pandémie Covid-19 ?

AY: Personnellement, j’ai abordé les compétitions en forme, aussi ce n’était pas l’année la plus facile. Heureusement j’ai pu concourir sur quelques épreuves. Cela a bien aidé. J’ai couru et gagné à WS UtÖ (Suède) avec Max Andersson. Ce fut un bon test car c’était une première course depuis bien longtemps. Et surtout c’était une des courses avec une qualité d’athlète présents que j’ai rarement vue sur une course de swimrun.

Puis il y a eu la WS Engadin (Suisse) où, avec Oscar, nous n’avons pas eu un super jour. Mais on était content d’avoir engrangé une session de 5h30 et empoché une seconde place. Enfin il y a eu WS Gothenburg (Suède) où nous avons eu un superbe jour, Oscar a été magistral là bas, nous l’avons remporté avec une concurrence relevée.

Du coté de l’entrainement en période de pandémie, c’était pour ma part assez difficile de se motiver en 2020. Les courses étant annulées les unes après les autres. Je suis resté fit, mais je n’avais pas beaucoup de volume d’entrainement. Cependant j’ai pu accélérer la cadence en vue de l’échéance des championnats de monde ÖtillÖ grâce à Oscar et les amis ici.

SRF: À quelle moment de la saison écoulée pensiez vous être en mesure de jouer pour le titre suprême ? Pensez vous que la Covid-19 s’est révélée un facteur prépondérant sur la condition physique des athlètes présents ?

Toutes les choses que tu as fait avant la course sont sous la surface, invisibles

Adriel

AY: Je crois qu’à partir de 2018, nous pensions toujours à la possibilité de remporter ces championnats du monde, mais je n’étais jamais vraiment certain que nous gagnerions le titre. Peut être que la Covid-19 a eu de l’influence, mais comme chaque année tu dois être là sur la ligne de départ en ayant fait le maximum pour être dans la meilleure forme qu’il soit. Cela fait partie de la performance, éviter la blessure en encaissant le volume d’entrainement que ton corps puisse supporter. C’est le même principe le jour de course lorsque l’on est sous pression. J’aime l’analogie de l’iceberg. Toutes les choses que tu as fait avant la course sont sous la surface, invisibles: à savoir l’entrainement, les petites blessures, la prépa, les tests du matos, la nutrition, l’équilibre familial et le travail. Et puis il y a la partie émergée de l’iceberg, celle que tout monde voit je jour de course. C’est évidemment une partie très importante, mais elle l’est moins que la partie immergée qui permet à l’ensemble de l’iceberg de flotter.

OO: Je pense que la Covid-19 a permis d’augmenter encore plus la condition physique des athlètes. Les personnes s’entrainent plus que lors d’une période avec des compétitions. Parfois je pense que de nombreuses personnes ont souffert de surentrainement et en conséquence se sont blessées. En tant qu’athlète, c’est important d’être en capacité de s’adapter à toutes les circonstances qui te tombent dessus à la fois en compétition et dans la préparation de celle ci.

SRF: Nous nous sommes croisés plusieurs fois durant la saison, j’ai été surpris qu’à la WS Engadin (Suisse) vous faisiez partie de la Media Team ÖtillÖ samedi pour l’épreuve sprint puis le lendemain vous participiez à la manche de coupe du monde. Pouvez vous nous en dire plus sur cet étrange enchainement ?

nous avons l’intention d’emmener avec nous les spectateurs au devant de l’action.

Oscar

AY: Ouais, là c’est Oscar le moteur, il a tout d’bord commencé à couvrir sur Instagram une course locale (i.e. Ö-loppet), ici à Göteborg. J’ai fait cette course et lorsque je suis rentré à la maison et vu son reportage : c’était vraiment cool ! Alors je lui ai écris et dit : tu dois faire un truc sympa avec ce talent. Ainsi @LiveSportTV.se est née. Le Swimrun est un sport dur à suivre pour les spectateurs. Oscar et moi avons cette science du sport, nous avons l’intention d’emmener avec nous les spectateurs au devant de l’action. L’objectif majeur pour nous est d’aider à la croissance du swimrun et d’autres petits sports avec une couverture médiatique de live en espérant procurer aux athlètes l’exposition qu’ils méritent.

SRF: Il y avait aussi une couverture « live » lors de la finale ÖtillÖ, mais vous courriez dans l’archipel de Stockholm, occupés à essayer d’augmenter votre avance à la tête de course sur les poursuivants ? Quand aviez vous décidé d’attaquer ? Plusieurs d’entre nous pariaient sur l’ile d’Örnö, quelle fut votre stratégie ? En 2019, un peloton assez conséquent en tête pendant longtemps a joué au chat et la souris.

AY: Oui J’imagine que la première partie du tracé nous va bien. C’est la plus technique en course à pied, et nous connaissons nos qualités sur ce terrain, alors oui nous avons parlé de la possibilité d’être seuls en tête à cet endroit. Nous avons beaucoup débriefé sur 2019, nous avons décidé de ne pas jouer à ce jeu psychologique là cette année. Nous voulions juste faire notre course et être fiers d’avoir tout donné en tant qu’équipe. Nous ne voulions surtout pas finir avec un sentiment de n’avoir pas fait le maximum.

SRF: Vu de l’extérieur, Adriel avait l’air de piocher un peu vers la fin. Nous avions l’impression qu’il y aurait peut être une bataille avec plusieurs équipes pour le finish. Étiez vous conscients des positions de Hugo, Matthieu, Fredrik, Lars vers la fin du parcours ?

AY: Oui, j’ai vraiment souffert de crampes vers la fin. Sans le dernier ravitaillement, je pense que nous aurions pu voir la victoire nous échapper. J’ai découvert après course que j’ai eu de multiples déchirures musculaires dans les ischios-jambiers et mes fascias du fait de courir perclus de crampes. Toutefois comme je l’ai dit, cela fait partie de la course ! Nous avons dû marcher un petit peu en essayant de ne pas trop stresser. Nous savions que notre avance de 6-7 minutes fondait un peu. Nous avons recouru pour retrouver cette avance et avons conservé cet avantage jusqu’à la ligne d’arrivée.

La première partie de la course sur des terrains techniques souligne la vitesse d’Oscar et Adriel, puis en fin de course lorsque Adriel souffrait de crampes

OO: Je n’ai jamais douté qu’Adriel aurait un coup de mou vers la fin. Il a été très fort tout au long de la journée, c’était juste une histoire de rythme à optimiser. Nous étions trés conscients du retour des autres à l’arrière. Nous n’avions pas besoin de prendre de risque sur la fin, il valait mieux la jouer « safe » et ne pas cramper. Nous comprenions que les autres auraient à prendre des risques s’il voulaient nous rattraper.

SRF: Finalement vous êtes les champions du monde de swimrun 2021 ! Quel est ce rituel avec la chaussure et le champagne Adriel ? Qu’avez vous ressenti lors de votre passage de la ligne d’arrivée avec le record à la clé de surcroit ?

AY: Ouais, ce qu’on peut dire c’est que j’étais super content de gagner, je pense que le fait de vaincre avec Oscar, qui s’est tant investi, était grandiose ! D’un point de vue personnel je voulais grimper cette dernière côte en marchant. Or avec toute la foule nous criant dessus de battre le record, c’était impossible de ne pas courir. Rétrospectivement, je suis content d’y avoir été poussé, c’était la cerise sur le gâteau. Je crois qu’un binôme, s’il est dans un bon jour, ne devrait pas trop avoir de souci pour approcher les 7h15. Quant au rituel de la chaussure, cela vient de chez moi (ndlr, Australie). Une nuit arrosée dans les pubs, quelques pilotes de F1 le faisaient sur le podium, alors j’ai commencé à faire cela pour me marrer. Ma binôme Eva n’a jamais vraiment été tenté de boire dans ma chaussure mais dès que je l’emportai avec des partenaires masculins, c’était très volontiers.

Je crois qu’un binôme, s’il est dans un bon jour, ne devrait pas trop avoir de souci pour approcher les 7h15

Adriel

SRF: Quelques unes de meilleures équipes masculines françaises commencent à combler le fossé avec les suédois. D’après vous que leur manquent ils encore pour remporter le titre mondial ?

Le tout est d’être capable de trouver une aisance, une relaxation dans ces moments d’inconfort.

Adriel

AY: Oui, ils vont de plus en plus vite et sont aussi de grands athlètes. Je crois qu’il ne va pas falloir attendre longtemps pour les voir sur la plus haute marche. Je dirai que pour le Swimrun, c’est la capacité de combiner plein de petites choses : tout d’abord se sentir confiant sur les parties pédestres techniques. Il ne faut pas stresser car tu brûles de l’énergie ou tu risques la blessure. Cela vient naturellement lorsque tu t’entraines sur ce terrain j’estime. Puis vient les transitions, entrée ou sortie d’eau doivent être fluides tel un flux constant entre courir et nager, sans stress. Encore une fois, cela vient avec plus d’entrainement et de compétitions jusqu’à devenir une seconde nature. Au final j’avancerai « d’être confortable et inconfortable ». Nous aimons tous courir avec des chaussures bien sèches et des t-shirts ou shorts seyants, ou nager dans une piscine chauffée. Or le swimrun n’est pas cela, tu dois te sentir à l’aise en courant avec tout l’équipement mais tu vas sans doute avoir des ampoules au pied, des brûlures de frottement, peut être une chute à un moment donné, prendre une vague de face et prendre le bouillon. Le tout est d’être capable de trouver une aisance, une relaxation dans ces moments d’inconfort.

OO: Les équipes françaises sont entrain d’y venir c’est sûr. Nous sommes les plus ravis ! Plus le niveau de compétitivité s’élève, le mieux ça sera pour le sport, et il continuera sa croissance. Je pense qu’il ne leur manque pas grand chose, ils sont encore relativement nouveaux dans le sport et avec plus d’expérience, ils y seront !

Plus le niveau de compétitivité s’élève, le mieux ça sera pour le sport, et il continuera sa croissance

Oscar

SRF: Quels sont vos projets maintenant ?

AY: Pas de compétition pour moi. Il est temps d’être en famille. (ndlr, depuis l’interview, Adriel a remis un dossard pour ÖtillÖ Malte avec Hugo Tormento, ils ont d’ailleurs remporté la victoire)

SRF: Quels sont les marques ou autres acteurs qui soutiennent vos carrières sportives ?

AY: Nous n’aurions pas été sur la ligne de départ sans l’aide de Anna-Karin de Simcoachen.se. Cette saison j’ai comme sponsor Koda Nutrition et Huub. Sur les championnats du monde nous avons eu la chance de bosser avec la géniale équipe de Ark inc.

SRF: Merci les gars de nous avoir accordé ce long interview, qui dévoile un bel aperçu de vos personnalités. J’espère que cela va convaincre nombreux de nos lecteurs de vous suivre dans vos prochaines aventures.

👉Oscar Olsson IG @o2_coaching

👉Adriel Young IG @swimrun_world
📍@LiveSportTV.se

crédit photo 📷 🎥 vidéo : Akunamatata / Mikael Josefsson / Otto Norin / Rasmus Lodenius / ÖtillÖ