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Wabi Sabi et Swimrun

🇬🇧 English version down below

La première fois que je les ai vus, ces athlètes se mouvant entre terre et mer tels des êtres amphibies, mes pensées se sont envolées vers Alessio. Il aurait saisi l’essence même de ce spectacle – cette étreinte du chaos, cette valse avec les humeurs de la nature. Par deux, ils progressent, reliés par un cordon ombilical de fortune, leurs cadences tantôt en symbiose, tantôt en lutte. C’est à l’image de la mer, jamais en repos, où chaque vague raconte sa propre odyssée. Les coureurs-nageurs (ou devrais-je dire nageurs-coureurs ?) arborent leurs combinaisons tronquées aux genoux, leurs chaussures gorgées de sel, leurs puces électroniques qui ponctuent le temps contre les roches millénaires avec une précision presque insolente. C’est un tableau à la fois dérisoire et sublime.

Je revois encore la scène à Utö Värdshus, les observant surgir de la Baltique. Deux par deux, telle une arche de Noé des temps modernes, chaque duo incarnant sa propre définition de la grâce. Le sel cristallisé dessine des constellations sur leurs visages, leur équipement porte les stigmates authentiques de l’aventure. Les uns tirent en avant pendant que les autres peinent derrière, l’élastique entre eux s’étirant comme les liens que nous tissons, éprouvons et consolidons au fil du temps. Dans notre quotidien aseptisé, nous fuyons ces marques – rides, usure, preuves irréfutables que le sablier s’écoule. Mais ici, ces imperfections deviennent des médailles d’honneur, des lettres d’amour au temps qui file.

Les gens d’ici me parlent de ce duo, père et fils, l’un soixante-six printemps au compteur, l’autre à peine quarante, qui ont bouclé le parcours il y a trois ans. Le cadet avait la fougue, comme ils disent, mais l’ancien possédait la sagesse même des pierres. Ensemble, ils ont trouvé leur tempo, ni à l’un ni à l’autre, mais quelque chose d’autre, quelque chose entre les deux. Ils me hantent, ces deux-là. À Marseille, d’où je viens, ils auraient défié le temps à coups de pastis et de boules pétanques qui roulent. Ici, ils le défient en s’y abandonnant corps et âme, en laissant chaque foulée être ce qu’elle doit être – unique, imparfaite, éphémère comme un souffle.

“Lagom”, disent les Suédois. “Juste ce qu’il faut.” C’est du wabi-sabi tout craché, cette idée que la perfection se niche dans l’acceptation de l’imparfait. Je les observe, ces binômes qui s’adaptent non seulement aux éléments déchaînés, mais l’un à l’autre, comme un vieux couple qui danse. L’un porte l’autre quand les jambes flanchent, les rôles s’échangent comme les marées. Ils naviguent entre les éléments comme l’esprit vagabonde entre les souvenirs, chaque transition gravant dans le temps un moment qui s’évanouit déjà.

Les griffures sur leurs combinaisons, la gadoue sur leurs chaussures, le sel qui constelle leurs cheveux – ce ne sont pas des imperfections à gommer mais la calligraphie même de leur vécu, écrite à quatre mains sur la page de leur existence commune. Dans mon carnet, je griffonne : “La beauté réside dans l’usure, dans l’art de céder.” On croirait du Joan Baez, mais c’est juste une vérité qui m’a frappé ici, entre les pins et les embruns.

La nuit, dans ma chambre ÖtillÖ avec vue sur l’archipel, je trie mes photos d’arrivée et je médite sur nos vies, ces courses folles d’une eau à l’autre – du liquide amniotique aux dernières ablutions. Mais on n’est pas censé faire ça en solo. Les Swimrunners semblent l’avoir compris, cette condition fluide de l’existence, cette dépendance vitale à l’autre. Ils parcourent leur route comme nous traversons la vie : tantôt à la nage, tantôt à la course, parfois locomotive, parfois wagon, perpétuellement en mouvement, jamais tout à fait les mêmes d’un instant à l’autre.

Ce matin, après ma nuit blanche, j’ai vu l’aube embraser l’archipel de Stockholm. La lumière jouait sur l’eau, brouillant la frontière entre ciel et mer. Une bande de swimrunners, visiblement pas de la course d’hier, est passée sous ma fenêtre, leurs traces humides s’évaporant déjà sur le macadam, leurs longes oscillant comme le balancier du temps. À l’heure où vous lirez ces lignes, ces empreintes auront disparu, l’eau aura changé de visage, les athlètes seront ailleurs. Rien ne dure. Rien n’est parfait. Tout est exactement comme il se doit.

Au fond, le Swimrun dépasse le simple cadre sportif. C’est une méditation sur le transitoire et l’interdépendance. C’est un exercice d’abandon contrôlé, une leçon sur la beauté qui se niche dans l’entre-deux, entre ordre et chaos, entre soi et l’autre. Il nous rappelle que nous sommes tous, à notre façon, en perpétuelle traversée des éléments, laissant nos traces, nous effaçant, resurgissant, vieillissant, nous adaptant, acceptant – ensemble. Ce n’est pas un drame. C’est le but.

La philosophie du wabi-sabi met l’accent sur la beauté de l’imperfection, de l’impermanence et de la nature. Le Swimrun, un sport qui combine la natation et la course à pied dans des environnements naturels, offre un contexte idéal pour appliquer les principes du wabi-sabi.

  • Accepter l’imperfection: Le wabi-sabi encourage l’acceptation des choses telles qu’elles sont, avec leurs imperfections et leurs asymétries. Dans le Swimrun, cela signifie accepter que les parcours ne soient pas parfaits, que les conditions météorologiques puissent être imprévisibles et que le corps lui-même peut avoir ses limites . L’accent est mis sur l’appréciation du voyage et des défis qu’il présente, plutôt que de viser une performance parfaite.
  • Embrasser l’impermanence: Le wabi-sabi reconnaît que tout est en constante évolution et que rien n’est permanent. Chaque course de Swimrun est unique, avec ses propres conditions et défis. En acceptant cette impermanence, les athlètes peuvent apprécier pleinement chaque moment de la course, sachant qu’il ne se reproduira jamais de la même manière.
  • Trouver la beauté dans la simplicité: Le wabi-sabi valorise la simplicité et l’authenticité. Dans le Swimrun, cela peut se traduire par l’utilisation d’équipements minimalistes, la concentration sur l’essentiel et la connexion avec la nature. L’objectif n’est pas de rechercher le luxe ou l’artifice, mais de trouver la beauté dans la simplicité de l’expérience.
  • Cultiver la résilience: Le wabi-sabi encourage une attitude de lâcher-prise et de non-attachement aux résultats. Dans le Swimrun, cela signifie accepter les difficultés et les revers comme faisant partie intégrante du sport. Les athlètes résilients sont capables de s’adapter aux changements de conditions, de surmonter les obstacles et de tirer des leçons de leurs erreurs.
  • Apprécier le partenariat: Le Swimrun se pratique généralement en binôme, ce qui offre une occasion unique d’explorer l’harmonie imparfaite. Les partenaires doivent s’appuyer sur leurs forces respectives, se soutenir mutuellement dans leurs faiblesses et travailler ensemble pour atteindre un objectif commun. Le wabi-sabi nous rappelle que la beauté peut être trouvée dans la collaboration et l’interdépendance, même lorsque les choses ne sont pas parfaites.
  • Ralentir et être attentif: Le wabi-sabi invite à ralentir, à être présent et à apprécier les petits détails. Dans le Swimrun, cela signifie prendre le temps d’observer la beauté des paysages naturels, de ressentir les sensations du corps et d’être attentif à son environnement. La pleine conscience permet aux athlètes de se connecter plus profondément à l’expérience et d’apprécier le moment présent.
  • Accepter le changement et le vieillissement: Le wabi-sabi nous enseigne que le vieillissement est un processus naturel qui apporte sa propre beauté. Les athlètes de Swimrun peuvent appliquer cette philosophie en acceptant les changements de leur corps et de leurs capacités au fil du temps. L’objectif n’est pas de rester jeune à tout prix, mais de trouver de nouvelles façons d’apprécier le sport et de continuer à progresser, quelle que soit l’étape de la vie.
  • Redéfinir le succès: Le wabi-sabi nous encourage à redéfinir le succès comme étant le voyage lui-même, plutôt que la destination. Dans le Swimrun, cela signifie que le succès ne se mesure pas uniquement aux résultats de la course, mais à l’expérience globale, aux connexions avec la nature et les partenaires, et à la croissance personnelle.

🧠🧬✍️ NotebookLM / Claude / ChatGPT / Akuna / Steve Magness
🎵 Suno
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Wabi Sabi and Swimrun

🇬🇧 The first time I saw them, these athletes moving between land and water like amphibious creatures, I thought of Alessio. He would have understood this immediately – this embrace of chaos, this dance with nature’s whims. They move in pairs, tethered by a thin cord between them, their rhythms either flowing together or fighting each other. Sometimes both. The way the water never stays still, how each wave carries its own rhythm, its own story. The runners-swimmers (or are they swimmers-runners?) wear their wetsuits cut at the knees, shoes soaked with saltwater, timing chips that beep with mechanical precision against the ancient rocks. There is something both absurd and profound about it all.

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I remember standing at Utö Värdshus, watching them emerge from the Baltic Sea. Two by two, like a post-apocalyptic Noah’s ark, each pair moving with their own interpretation of grace. Their faces marked with salt crystals, their equipment bearing the honest scars of the journey. Some partners pull ahead while others lag behind, the elastic cord between them stretching like the bonds we forge and test and strengthen. We are so afraid of these marks in our daily lives – the wrinkles, the wear, the evidence that time is passing. But here, these imperfections are worn like medals, like love letters to the passage of time.

The locals tell me about a pair of men, father and son, one sixty six years old, one barely forty, who completed the course three years ago. The younger man had more speed, they say, but the elder had the wisdom of the rocks themselves. Together they found a rhythm that belonged to neither of them individually but rather to the space between them. I think about them often. About how in Marseille, where I come from, they would be fighting time with pastis and pétanque games. Here, they fight it by surrendering to it, by letting each footstep on the trail be what it is – unique, imperfect, gone the moment it happens.

There’s a Swedish word, “lagom,” that means “just enough.” It sits well with wabi-sabi, this idea that perfection lies in the acceptance of imperfection. I watch the pairs adapt not just to the terrain and wind, but to each other. One partner strong where the other weakens, roles shifting like the tide. They move between elements like thoughts between memories, each transition marking another moment that will never come again.

The scratches on their wetsuits, the mud on their shoes, the salt in their hair – these are not flaws to be corrected but rather the calligraphy of experience written on the page of their shared being. In my notebook, I write: “The beauty is in the wearing down, in the giving way.” It sounds like something Joan Baez might have sung, but it’s actually something I’m learning here, between the pine forests and the sea.

At night, in my ÖtillÖ rented room overlooking the archipelago while working on the finish line pictures, I think about how we spend our lives running from one kind of water to another – from the waters of birth to whatever waters await us at the end. But we don’t do it alone, or at least we shouldn’t. The Swimrunners seem to have made peace with this fluid state of being, this dependency on another soul. They move through their course like we move through our lives: sometimes swimming, sometimes running, sometimes pulling, sometimes being pulled, always in motion, never quite the same person from one moment to the next.

This morning, after my night shift, I watched the sun rise over the Stockholm archipelago. The light caught the water in a way that made it impossible to tell where the sea ended and the sky began. A group of swimrunners, obviously not from the race yesterday, passed below my window, their wet footprints evaporating on the macadam, their tethers swaying between them like pendulums marking time’s passage. By the time you read this, those footprints will be gone, the water will have shifted, the athletes will have moved on. Nothing stays. Nothing is perfect. Everything is exactly as it should be.

In this way, perhaps, Swimrun isn’t just a sport. It’s a meditation on impermanence and interdependence, a practice in letting go while holding on, a lesson in finding beauty in the spaces between perfection and chaos, between self and other. It reminds us that we are all, in our own ways, moving through elements, leaving traces, disappearing, emerging, aging, adapting, accepting – together. This is not a tragedy. This is the point.

🧠🧬✍️ NotebookLM / Claude / ChatGPT / Akuna / Steve Magness
🎵 Suno
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