Le Cœur des Supporters : Marc Sopena se dévoile

Qu’est-ce qui anime cette soif insatiable de compétition, ce besoin viscéral de se mesurer aux autres, à soi même, de repousser ses limites dans un environnement souvent hostile ? Une interrogation fondamentale que tout athlète a rencontrée sur son parcours. Aujourd’hui, la parole est donnée à ceux qui comptent énormément pour les sportifs, ces piliers indispensables sans lesquels la motivation vacillerait : les supporters. Marc Sopena en fait partie. Passionné, il accompagne fidèlement les doubles champions de France 2021 et 2022, Fabien Besançon et Pierre Massonneau, lors de leurs épreuves de Coupe du Monde et championnats ÖtillÖ. Avec authenticité, Marc dévoile les motivations profondes qui le poussent à sillonner l’Europe pour encourager ses amis au bon endroit, au bon moment.

A] 📍Swimrun France : Bonjour Marc, peux tu te présenter brièvement ?

Marc Sopena : Bonjour. Je m’appelle Marc Sopena, je suis entraîneur de natation professionnel en région parisienne sud. Je fais moi même un peu de sport, et principalement de la course à pied et du trail quand j’ai la chance d’aller en montagne. Mais sans dossard, uniquement par plaisir et pour rester en forme. Je suis sur une bonne partie des épreuves de swimrun Pierre et Fabien depuis le début de leur aventure et de leur association, et principalement Fabien vu que je suis son mari. Et avant qu’il ne se lance dans le swimrun, je le suivais sur ses épreuves de triathlon (label Ironman principalement). Bref, quoiqu’il fasse, je suis là.

B] 📍SRF : Qu’est-ce qui te motive à venir encourager les athlètes ?

MS : Étant entraîneur de natation professionnelle, j’entraîne des jeunes de niveau régional à national. J’ai la compétition dans le sang et mon niveau en course à pied ne me permet pas de me truster les podiums 😁. Je pense que d’un côté, je vis par procuration les courses de Pierre et Fabien et que d’un autre, j’aime me dire que je suis une petite aide pour eux dans la logistique et les encouragements que je peux apporter. Mon métier et mon expérience dans ce dernier me permet, je pense, de les aider également quand ils sont en course en leur donnant des écarts, ou donnant des informations sur l’état de forme des adversaires etc.

C] 📍SRF : Comment tu vis les épreuves depuis la ligne de départ/arrivée ? As-tu le trac pour eux ?

MS : Beaucoup trop malheureusement. Je suis un grand stressé, et mes collègues supporters ont quelques fois du mal avec mon euphorie ou mon abattement. Selon les périodes que traversent Pierre et Fabien…

D] 📍SRF : Quels sont selon toi les moments les plus intenses à suivre en tant que supporter ?

MS : Plutôt qu’un moment, je parlerai d’une course. Si il y en a une à vivre, c’est les championnats du monde ÖtillÖ. Par contre, c’est une expérience qu’il faut anticiper. La première année, en 2021, nous avions « suivi » la course du ferry, une énorme frustration. On ne voit rien, on ne sert à rien. En 2022,, j’ai loué un bateau, poursuivre la course d’au plus près. En 2023, j’ai repris le même bateau avec le même skipper, et c’est huit heures de kiff total.

Grâce à Johann, on a la chance de pouvoir suivre Pierre et Fabien de la première mise à l’eau au sprint final. Il peut nous dépose plusieurs fois sur les îles, pour que je puisse me dégourdir les jambes et donner de la voix. Et le faite d’avoir toujours le même skipper, nous permet de mieux nous connaître, et de passer vraiment un bon moment.

E] 📍SRF : Comment tu t’organises pour les suivre sur l’ensemble du parcours ? As tu eu des galères que tu peux nous dire lors d’un suivi particulièrement houleux ?

MS : Quand le parcours ne permet pas de suivre les athlètes de façon régulière, je loue un bateau. Sinon, j’opte généralement pour le vélo. Ça me permet de suivre vraiment les courses de l’intérieur du début à la fin. Niveau galère, à part cette anecdote de ferry, sur les championnats du monde où j’ai passé 8h30 d’énervement et de frustration, je n’en vois aucun. Je planifie généralement toujours mes déplacements, je sais où je serai placé durant le parcours, et Pierre et Fabien le savent aussi.

F] 📍SRF : Que leur cries-tu pour les encourager pendant l’effort ? Des conseils, des félicitations ?

MS : C’est assez basique, beaucoup d’encouragement, bien évidemment. Très peu de conseils, ils savent ce qu’ils ont à faire et savent se gérer. Je donne les écarts, et j’essaye de transmettre ce que je vois des concurrents au niveau de leur état de forme. Quelques fois, je manipule un peu les chiffres pour les motiver, mais c’est très rare.

G] 📍SRF : Ressens-tu de la fierté à les voir relever ce défi ?

MS : Énormément. J’entraîne sept fois par semaine mes nageurs, je vois Fabien s’entraîner tous les jours sans relâche et concilier sa vie de médecin et sa vie de famille. Je sais que tu représentes ce genre d’investissements. Je suis donc très fier de les voir, réussir ce qu’entreprennent, quelque soit la difficulté des parcours . Aucun des deux n’est professionnels, ils ont tous les deux un métier prenant à côté, tous les deux une vie de famille avec enfant. C’est très impressionnant.

H] 📍SRF : Comment tu les soutiens après la course, dans la récupération ?

MS : Généralement, c’est plutôt eux qui me soutiennent, en me rapportant à boire et à manger. Il est souvent impossible au suiveur d’accéder au buffet des athlètes, ce qui est totalement logique. Il me récupère donc au passage de de quoi me ressourcer. Il paraît que je me donne beaucoup durant la course. 😁 ensuite, on débrief sur leur vécu intérieur de course, et moi de l’extérieur. On se remémore les bons passages, les coups durs etc.

I] 📍SRF : Qu’est-ce qui te plaît dans l’ambiance entre supporters sur ces événements ?

MS : On retrouve généralement toujours les mêmes personnes, c’est super sympa. J’aime beaucoup attendre les athlètes avec d’autres suiveurs, on se tire un peu la bourre à savoir lequel de nos athlètes arrivera le premier sur le point de passage !

J] 📍SRF : Penses-tu t’adonner aussi au swimrun un jour ?

MS : Alors là, aucune chance. Il faudra me payer cher pour que je puisse me faire aussi mal qu’eux !

K] 📍SRF : Comment vis-tu les moments de doute et de fatigue des participants ? Que fais-tu pour les encourager à ne pas lâcher ?

MS : J’essaie souvent de les raisonner et de leur dire que la course est longue. Il y a toujours un moment difficile dans une course, mais qu’ils ont toujours réussi à trouver un second souffle. Egalement que tous les concurrents subissent ces coups de mou, et que personne n’est à l’abri.

L] 📍SRF : Ressens-tu une certaine pression à devoir les booster mentalement sur toute la durée de l’épreuve ?

MS : Effectivement. Quand ils arrivent dans une mauvaise passe, je me dois de les rassurer ou d’essayer. Et ce n’est pas chose facile. Et je me mets la pression de savoir si je vais arriver à les aider à remonter la pente ne serait ce que mentalement.

M] 📍SRF : Comment tu perçois leur état d’esprit et leur moral à leur arrivée ? Fiers, soulagés, épuisés ?

MS : Épuisés ! On peut dire qu’ils jouent le jeu à fond et savent se donner à 100%. Rares sont les fois où ils tiennent debout à la fin d’une course. Et ensuite vient la fierté de la course réalisée (ou à défaut l’énervement de la course ratée).

N] 📍SRF : Leur apportes-tu aussi un soutien psychologique dans la préparation, pour les aider à dompter leurs peurs ou appréhensions ?

MS : Absolument pas. Pierre est l’entraîneur et il gère toute la préparation. En plus avec la vie de folie qu’à Fabien, il s’entraîne souvent à 6h ou 7h le matin avant sa grosse journée.

O] 📍SRF : Quel est selon toi l’élément mental le plus important à travailler pour aller au bout d’un swimrun ?

MS : La confiance en soi. Savoir ce qu’on peut réaliser grâce aux différents entraînements et, même dans la difficulté de la course, car il y en aura,, rester fixer sur cet objectif.

B] 📍SRF : Comment tu les félicites a posteriori pour leur performance et leur ténacité, malgré l’échec d’un objectif temps par exemple ?

MS : Concernant Fabien c’est assez simple. Il repère avant la course quelque chose qui lui ferait plaisir et s’il réalise une bonne course, il se l’achète pour se féliciter. Et s’il fait une mauvaise course, il se l’achète pour se remonter le moral… et moi j’approuve quoiqu’il se passe !

P] 📍SRF : Y a-t-il parfois des tensions à gérer entre les attentes des supporters et l’état réel des participants ?

MS : Une seule fois à vrai dire. Un doublé de courses sur un WE. Une le samedi et une le dimanche (à 4h de route). Personnellement j’attendais avec impatience celle du dimanche et je ne comprenais pas qu’ils fassent celle du samedi, que je jugeais moins intéressante sportivement parlant. J’ai donc décidé de rester travailler avec les nageurs le vendredi soir et samedi matin et de faire l’impasse en tant que supporter. Je devais même zapper la course du dimanche mais l’appel du swimrun a été le plus fort. J’ai sauté dans un tgv et suis arrivé le samedi soir, prêt à donner de la voix pendant 5h le dimanche puis faire 5h de route en voiture pour rentrer.

Q] 📍SRF : Pour finir quelles seraient les qualités d’un génial supporter ?

MS : Déjà avoir du temps et pas bosser le WE, ce qui n’est pas mon cas. Ensuite avoir une voix qui porte, des jambes solides (pour les suivre en vélo ou taper un sprint à côté d’eux pour les encourager), et un mental à toute épreuve ! Mais surtout aimer le swimrun !

📍SRF : Merci Marc

✍️Marc Sopena IG:@marc.sop
📷 Marc Sopena / Akuna / ÖtillÖ / Troll Enez