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J’irai swimrunner chez vous – Trégastel Côtes d’Armor

Nous poursuivons le cycle des [J’IRAI SWIMRUNNER CHEZ VOUS 🏊‍♀️🏃⛰️🌊] par la communauté des côtes-d’Armor « Armorica 22 Swimrun » de Patrick dit l’indien.

L’idée d’aller en Bretagne taquiner l’océan et les bigoudens était plus que séduisante. En effet depuis l’avènement du swimrun en France en 2015, la Bretagne fut une région pionnière en la matière avec la tenue du Troll Enez, reconnu pour être l’ÖtillÖ breton. Depuis les communautés et courses ont fleuri ci et là, attirant de nombreux curieux et amoureux de l’outdoor de tous horizons sportifs (nageurs en eau libre, traileurs, triathlètes…). C’est dans ce cadre, hors fédéral, qu’un écosystème venu des pratiquants bretons a su s’imposer dans le paysage swimrun.

Ce n’est pas ma première tentative. En 2018, j’ai failli participer à Brigognan au Off sur 2 jours de la communauté des SFRO. Aventure, éparpillée façon puzzle, par des conditions météo défavorables même pour les locaux, c’est peu dire. À l’occasion de ma venue au Breizh Swimrun de Fouesnant, mon tour des communautés bretonnes passe par les SFRO du Finistère (voir le reportage à Plouguerneau là: 👉 https://swimrunfrance.fr/2021/10/02/jirai-swimrunner-chez-vous-plouguerneau-finistere/) et la communauté « Armorica 22 Swimrun ».

Patrick Huon, venu du triathlon, a sauté à pied-joint dans le bain du swimrun. Conquis par l’approche d’une discipline encore non structurée au niveau national, il a épousé cette discipline où les athlètes tiennent encore le destin de leur sport entre leurs plaquettes. C’est l’époque où le matériel tenait plus du bricolage que de la formule 1, où le simple fait de participer, découvrir ce nouveau sport, comme si un dialogue avec la nature, se suffisait à eux même.

Des formes de roches tarabiscotées

Trégastel situé sur la côte de granit rose est le choix du jour. Une sortie placée sous le signe de la découverte d’un « merroir et terroir » où je compte bien jouer au japonais mitraillant à tout va. Patrick, Jean Philippe et moi, sommes un trio chanceux tant la météo nous sourit en éclaboussant ce ciel mi figue mi raisin de couleurs changeantes. « La mer est haute à 8h30 ce matin » me souffle Patrick. Il me faut quelques explications pour comprendre le sens de cette phrase. Haute ? On doit faire du saut en hauteur pour aller se baigner ? Goguenard, l’indien m’explique l’effet concret des marées sur une sortie swimrun. Marrant j’aurais plutôt employé le terme de mer lointaine et proche du littoral. Et encore en quoi cela nous empêche d’aller courir au bord de cette mer aussi lointaine qu’elle soit ? Bref le marseillais qui n’a jamais vu la mer se barrer et marcher littéralement au fond de la mer !

Notre sortie n’est pas longue en distance ou dénivelé (tout au plus 5 ou 6 km), mais ici les distances ne veulent pas dire grand chose, surtout lorsque nous sommes soumis à des courants capricieux d’une mer qui s’en va bouder dans les confins. Plusieurs fois je sens des courants contraires sur de petites portions aquatiques tachetées d’ilots rocheux. Sur terre, nous évoluons entre ces rochers au granit rose, limés au premier abord, mais décidément rugueux lorsqu’un morceau de chair s’y frotte.

Parfois encore ornés de goémon ou de mousse émeraude, nos sautillement de cabri entre ces blocs en font un entrainement idéal pour les rochers cousins nordiques de l’archipel de Stockholm. Il faut surveiller attentivement l’écotone, ligne de flottaison entre l’univers marin et terrestre, synonyme de changement d’appui au sol.

« Le plus beau cadeau fait à l’avenir est de tout donner au présent » Albert Camus

Patrick s’amuse à nous montrer les formes tarabiscotées sculptées par l’érosion durant des eons. Il prend un malin plaisir à nous perdre dans des labyrinthes où la sortie se fait par une chatière, qui quand la mer s’approche du sentier littoral se transformera en petit siphon sous marin.

Les fonds sous marin sont étonnamment clairs, persuadé dans mes biais de marseillais que la turbidité de la Manche n’autorisait pas une si belle vision d’un monde aquatique bien plus riche qu’en mer Méditerranée. La température de l’eau est paradoxalement maintenant plus chaude ici (17°C) qu’à Marseille (15°C après un nième épisode de mistral). Le regard porte loin aussi à l’horizon sur la réserve naturelle nationale des sept iles (île au Moine, Plate, Bono etc..). Avant que les îlots visités à ce moment ne deviennent presqu’iles (et ainsi ouvrir l’accès aux piétons), nous sommes seuls, heureux d’être ici et maintenant. « Le plus beau cadeau fait à l’avenir est de tout donner au présent » Albert Camus. Alors nous donnons et recevons de tous nos sens: le froid, le chaud sur nos peaux, le goût de l’eau salé dans nos bouches et nos écorchures, les couleurs de l’air marin et bruissements de palettes d’azur et de rose.

Notre trio se suit, se perd dans le dédale de cailloux comme laissé ici par un chaperon rouge titanesque. Nous n’avons fait que 6 km, et il y en aurait 40 à faire de plus sur cette côte dévorée quotidiennement par la marée !

L’expérience swimrun est plurielle par nature, et nous partageons ce fil ténu avec le berceau de notre humanité

Patrick Huon dit l’indien, boss de la communauté Armorica 22

Au final, le swimrun dans les côtes d’Armor, et en particulier sur la côte de granit rose, c’est pratiquer l’immersion du corps vivant dans une mer riche, intense, mercuriale, des rochers au granit sanguin et rêche. Une relation qui peut vite virer à l’osmose, à la recherche du « flow » au risque de s’oublier dans ce lien qui libère.

La vitalité des communautés bretonnes constitue une des pierres angulaires d’une adaptation constante du mouvement swimrun. Les valeurs du swimrun qui tiennent en équilibre instable entre éléments que pour autant elles demandent de tous une volonté d’avancer ensemble. L’expérience swimrun est plurielle par nature, et nous partageons ce fil ténu avec le berceau de notre humanité

Merci Patrick (IG: @swimrunarmorica) d’avoir mis un peu de Côtes d’Armor rehaussées de granit rose dans mon âme de swimrunner.
Akuna